vendredi 4 mars 2016

Les taux d’emprunt des Etats s’enfoncent plus loin en territoire négatif

Les taux d'emprunt des Etats s'enfoncent plus loin en territoire négatif

Un mot d’économie – je parle peu des soubresauts de la Bourse – c’est sans grand intérêt.

Que les taux baissent, cela s’explique – ou pas.

Mais il y a un point FONDAMENTAL, dont on parle très peu je trouve, c’est le passage en taux NÉGATIF.

Les médias soulignent très peu cette évidence : mais un taux négatif cela signifie, certes, qu’on est prêt à perdre de l’argent en investissant, mais cela veut surtout dire que, bien évidemment, on préfère perdre de l’argent pour na pas laisser son argent sur un compte en BANQUE.

Et donc que les financiers craignent une faillite de la banque, ce qui est un drame dans un système monétaire, vu que mettre son argent à la banque est censé être sans risque…

Mais les financiers, contrairement aux journalistes, comprennent souvent bien ce qui se passe dans ce secteur, d’où leur légitime crainte, comme on l’a longuement expliqué sur ce blog en 2012-2013…  :)

Source : Les Echos, Isabelle Couet, 29-02-2016

L'encours de dette souveraine ayant des taux négatifs atteint des proportions vertigineuses. Il dépasse 5000 milliards de dollars selon JPMorgan - Shutterstock

L'encours de dette souveraine ayant des taux négatifs atteint des proportions vertigineuses. Il dépasse 5000 milliards de dollars selon JPMorgan – Shutterstock

L'Allemagne emprunte à taux négatif jusqu'à 9 ans, la France jusqu'à 7. Le retour de la déflation en février fait encore reculer les rendements obligataires. La BCE est attendue au tournant le 10 mars.

Les analystes sont perplexes. Les rendements obligataires s'enfoncent sous le seuil de 0 % à une vitesse effroyable. Ce lundi, les taux des obligations européennes poursuivent cette décrue que rien ne semble pouvoir arrêter. Les taux de l'Allemagne sont négatifs jusqu'à 9 ans (-0,013 %), ceux de la France jusqu'à 7 ans (-0,023 %), ceux de la Suisse jusqu'à 20 ans (-0,018 %). Et, en dehors de l'Europe, les taux japonais sont aussi passés sous la barre de zéro sur la maturité à 10 ans.

70 % des emprunts allemands ont des taux négatifs

Selon une note de la Société Générale, désormais 70 % de l'encours de dette allemande évolue sous le seuil de 0 %. Les analystes de la banque se préparent à voir le rendement à 10 ans allemand passer en territoire négatif au deuxième trimestre. « La détente continue, sans aucune accalmie, dans un contexte de détérioration des perspectives économiques globales, de tension sur le secteur financier, les matières premières et les marchés émergents ».

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Le chiffre d'inflation dans la zone euro, publié ce lundi, n'arrange rien. L'inflation est retombée en territoire négatif (-0,2 % en rythme annuel) en février. « La déflation est de retour. Surtout la vraie mauvaise surprise est que l'inflation sous-jacente (hors alimentation et énergie) est en baisse, à 0,7 %, son niveau le plus faible depuis avril 2015 », souligne l'équipe d'ING.

Une situation qui alimente les spéculations sur le prochain geste de la Banque centrale européenne (BCE), qui se réunit la semaine prochaine. « Le chiffre d'aujourd'hui va donner des armes aux 'colombes' (les banquiers centraux qui veulent une politique monétaire encore plus accommodante, NDLR) et promet de façon quasi-certaine qu'il y aura de nouvelles mesures de soutien », estime ING.

La BCE attendue au tournant le 10 mars

Beaucoup d'analystes et d'économistes tablent sur une baisse du taux de dépôt de la BCE, qui évolue déjà en territoire négatif. « Nous anticipons une baisse de 20 points de base en mars ainsi qu'une extension des prêts de très longue maturité (TLTRO) de la BCE pendant un an », indiquait déjà la Société Générale la semaine passée. Chez Pictet, Frederik Ducrozet table sur une baisse de 10 points de base du taux de dépôt, associée à  un système de taux à double détente (avec un seuil qui délimite le type de banques exposées au taux de dépôt), une augmentation de 20 milliards d'euros par mois du programme d'achats d'actifs financiers (avec des changements dans les modalités) et un nouveau prêt de longue maturité pour les banques.

 Cinq banques centrales dans le monde ont déjà adopté le taux directeur négatif. « Au cours des dernières années, beaucoup de banques centrales ont abaissé leur taux pour tenter d'atteindre leur objectif d'inflation. Mais, de façon discutable, certaines sont allées plus loin – abaissant leur taux sous 0 % en pensant que si une baisse de 1 % à 0 % n'avait pas marché, une baisse de 0 % à -1 % pourrait fonctionner », ironiste Steven Major chez HSBC. De fait, plus les instituts d'émission s'enfoncent en territoire inconnu, plus les doutes grandissent sur leur maîtrise de la situation et en particulier sur leur capacité à relancer l'inflation.  La BCE a lancé son programme d'achats d'actifs il y a un an  : l'idée était de faire baisser les rendements des emprunts d'Etat (en en achetant massivement), pour injecter de la liquidité dans le marché et pousser les investisseurs vers d'autres types d'actifs financiers, tout en incitant les banques à faire crédit et en faisant reculer l'euro. Tout un dispositif censé stimuler l'inflation. Or, le résultat n'est pas probant.

Plus inquiétant encore, même la Réserve fédérale américaine, pourtant engagé dans un processus de remontée de ses taux directeurs depuis décembre, a mentionné l'arme des taux négatif, si jamais les conditions économiques se détérioraient sérieusement.

I.Co

Source : Les Echos, Isabelle Couet, 29-02-2016

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